La RDC et le Rwanda ont signé un accord de paix historique à Washington

Politique

La République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda ont signé un accord de paix, ce 27 juin 2025 à Washington, sous l’égide des États-Unis, visant à mettre fin au conflit dans l’est de la RDC, qui a fait des milliers de morts. Fin juillet est prévu un sommet inter-États avec le président congolais Félix Tshisekedi et son homologue rwandais Paul Kagame, tous les deux conviés à la Maison Blanche par Donald Trump.

Poignée de main entre les ministres des Affaires étrangères du Rwanda et de la République démocratique du Congo après la signature de l’accord de paix entre les deux pays, le 27 juin 2025 à Washington. © YouTube / U.S. Department of State (capture d’écran)

L’accord a été signé par les ministres des Affaires étrangères rwandais et congolais lors d’une cérémonie présidée par le secrétaire d’État américain Marco Rubio. Une poignée de main historique entre les ministres des Affaires étrangères rwandais et congolais a conclu la signature de cet accord en trois exemplaires. « C’est un moment important après trente ans de guerre », a déclaré le secrétaire d’État américain Marco Rubio lors d’une cérémonie au département d’État aux côtés de ses homologues rwandais et de la RDC, ajoutant cependant qu’il y avait encore « beaucoup à faire ».

Nous vous sommes reconnaissants, à tous les deux. Je sais à quel point cela a été difficile, combien de travail cela a nécessité, et nous savons qu’il reste encore beaucoup à faire. Mais nous sommes honorés de faire partie de tout cela et d’y contribuer. C’est vraiment pour des moments comme celui-ci que j’ai voulu ce poste et que je l’embrasse avec autant de conviction. C’est cela, en essence, le département d’État : c’est vraiment le département de la paix.

Marco Rubio, secrétaire d’État américain

L’accord est « fondé sur l’engagement pris ici de mettre fin de manière irréversible et vérifiable au soutien de l’État aux FDLR et aux milices associées », a déclaré le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe, lors de la cérémonie. « Nous devons reconnaître qu’il règne une grande incertitude dans notre région et au-delà, car de nombreux accords précédents n’ont pas été mis en œuvre et il ne fait aucun doute que la route à venir ne sera pas facile. Mais avec le soutien continu des États-Unis et d’autres partenaires, nous croyons qu’un tournant a été atteint », a-t-il ajouté.

L’accord « prévoit le désengagement des forces armées, la protection des civils, le retour des personnes déplacées et des réfugiés sous l’autorité du gouvernement – et établit un mécanisme de suivi pour en assurer le respect », a souligné la ministre des Affaires étrangères de la RDC Thérèse Kayikwamba Wagner. « Il ne s’agit pas de simples mots sur le papier. Ils doivent maintenant être traduits en actes, dans le respect de la justice, de l’obligation de rendre compte et de la volonté politique ».

Le conseiller du président Trump pour l’Afrique, Massad Boulos, a lui indiqué que Kigali s’engage à la « levée des mesures défensives du Rwanda » même si l’accord ne parle pas explicitement du M23. Cet accord de paix « n’est que le début, pas la fin », a dit la ministre congolaise.

Donald Trump salue « un nouveau chapitre d’espoir »

Le président américain Donald Trump a salué la signature d’un accord de paix entre la République démocratique du Congo et le Rwanda qui ouvre selon lui « un nouveau chapitre d’espoir » dans la région. « Aujourd’hui, la violence et la destruction prennent fin et toute la région entame un nouveau chapitre d’espoir et d’opportunités, d’harmonie, de prospérité et de paix », a déclaré le président Donald Trump aux côtés des ministres des Affaires étrangères des deux pays. « C’est un jour merveilleux », a-t-il ajouté.

Le président américain Donald Trump s’exprime lors d’une réunion avec la ministre des Affaires étrangères de la République démocratique du Congo, Thérèse Kayikwamba Wagner (à droite), et le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe (2e à gauche), dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 27 juin 2025. AFP – ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Selon des documents consultés par RFI et des sources proches de la médiation, avant cette signature, le projet de texte consacrait aussi un important volet économique. Il prévoyait en effet un cadre d’intégration régionale, des projets structurants dans l’énergie, les ressources naturelles et les infrastructures, intégrant les intérêts américains dans la région.

Pour rappel, cet accord signé ce vendredi s’inspire d’une Déclaration de principes approuvée en avril entre les deux pays. Selon le département d’État américain, il prévoit des dispositions sur « le respect de l’intégrité territoriale et l’arrêt des hostilités » dans l’est de la RDC après l’offensive menée par le M23.

Ce groupe armé, soutenu par le Rwanda selon l’ONU et différentes chancelleries occidentales, s’est emparé des villes de Goma et Bukavu, respectivement capitales des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, au terme d’une offensive faisant des milliers de morts.

Les États-Unis se sont déjà investis par le passé pour tenter de résoudre la crise dans l’est de la RDC

Ce n’est pas la première fois que Washington s’implique dans la crise de l’Est congolais. Exemple : le 26 octobre 2004, un accord tripartite entre la RDC, le Rwanda et l’Ouganda est signé à Kigali, sous la facilitation américaine. C’est le sous-secrétaire d’État Donald Yamamoto qui pilote les discussions. L’objectif était d’instaurer des mécanismes conjoints de sécurité aux frontières. Mais sur le terrain, les résultats se sont fait attendre.

Autre tentative plus récente : les 19 et 20 novembre 2023. Les présidents Tshisekedi et Kagame promettent de mettre en place des mesures concrètes pour réduire les tensions. Avril Haines, la patronne du renseignement national américain, se rend à Kinshasa et Kigali. Elle promet un suivi strict. Mais là encore, peu d’effets visibles.

Sur le terrain, la situation sécuritaire s’est fortement détériorée. Ensuite, Donald Trump veut marquer l’histoire. Son équipe le dit : il vise le prix Nobel de la paix. Autre facteur important : la stratégie américaine. Washington veut renforcer sa présence économique et politique en RDC, face à une Chine déjà bien implantée, notamment dans le secteur minier.

Et justement, sécuriser l’accès aux minerais stratégiques de la région est devenue une priorité pour les États-Unis. Mais tout cela dépend du retour effectif de la paix. Deux grands défis se posent encore : le premier, c’est le sort des FDLR. Ce groupe armé n’est pas impliqué dans les discussions et devra être neutralisé, dit l’accord.

La tâche ne sera pas si simple. Le second, c’est la question de l’AFC/M23. Le mouvement contrôle toujours plusieurs agglomérations dans l’est de la RDC. Un accord séparé est en négociation à Doha, mais il n’est pas encore signé. C’est sans doute là le prochain grand défi.

Pour Pierre Boisselet, directeur du pilier violence de l’institut congolais Ebuteli, la signature de l’accord de paix n’est pas forcément synonyme de fin des hostilités, malgré l’accalmie observée ces derniers mois. « Le front n’a pas beaucoup évolué. Maintenant, cela peut tout à fait reprendre à tout moment, je dirais. On a vu ça dans le passé au cours de cette crise, des cessez-le-feu plus ou moins respectés, le front plus ou moins gelé et derrière, suite à des échecs politiques ou diplomatiques. Un conflit qui redevenait actif avec à nouveau des conquêtes territoriales importantes, souvent d’ailleurs au profit du M23 et de l’armée rwandaise », prévient-il.

RFI

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